Et si les gens croisent votre regard, ils le détournent bien vite, parfois le soutienne désagréablement. Il est vrai que l'inverse est présent, mais domine-t-il? Il serait si bien que cet inverse soit l'unique présent sur les trottoirs et sur les routes. Quelles sont ces raisons qui font que les gens expriment comme des reproches à des inconnus qu'ils ne feront que croiser?
Le couple entre à nouveau dans la rue presque inchangé à avant. La traverse dans une course effrénée. Par chance durant leur petite absence la rue c'est un peu vidée. L'écharpe s'est un peu dénouée du cou, le rythme qu'ils s'imposent doit faire oublier le froid. Maintenant, la femme traine un sac à main derrière elle. Soudain, ils s'arrêtent. Face à eux brille la vitrine d'un restaurant. A l'intérieur, la pièce est baigné par les lumières qui émanent des tables, du plafond et du comptoir. Le jour en semble prolongé. Les nappes blanches recouvrent les tables, qui sont encadrées par de hautes chaises en bois. Les grandes assiettes carrées attendent d'être remplis, siègent à coté les nombreux couverts. Au fond, on entend à peine le vacarme des cuisines qui s'activent. La porte s'ouvre. Le froid pénètre la pièce un court instant. Les yeux se posent sur le couple. Ils n'attirent pas l'attention longtemps. Leur table était réservée. Ils traversent la pièce. Pas un mot. Ainsi, des gens viennent et vont, se croisent et se retrouvent dans un même lieu, mais ils semblent que cela soit dans l'égoïsme. Pourtant les anniversaires, les demandes en mariages, toutes ces joies, que l'on partage des fois alors que l'on ne se connait pas, existent. Les gens n'en redemande-t-il pas? Être gourmand de ses bonheurs partagés semble comme interdit.
Le couple s'installe. Ils mélangent leur regard, et l'homme se perd dans des rêves infinis qui trouve naissance dans les yeux de sa belle. Si belle et élégante dans cette robe qui ne masque que peu ses épaules et qui offre son dos à des yeux enchantés. Jouant de sa jambe, furtivement elle la passe au travers de la fente de sa robe, pour de suite réfugier son pied sous les plis. L'homme est charmé mais d'autre le sont aussi. Avant ignoré, maintenant trop observé. Comme un briseur de charme, innocemment le serveur interrompe ce jeu de la séduction en apportant la carte. Le regard encore troublé, l'homme fait défiler ses yeux sur les nombreuses lignes noires du menu. Dans ces plats qui s'offrent à eux, ils doivent choisir. L'un préfèrera du poisson, l'autre une viande tendre, on choisit son accompagnement, la sauce, le vin, jusqu'au dessert. Ces choix sont nombreux, mais si simple. Et avant tout personnel. Ils discutent avec le serveur, l'assaille de questions. Puis ils font leur choix. Plus tard ils seront servis, dinerons, et enfin ressortiront de ce lieu. Innombrables visages dans l'esprit des serveurs, ils seront vite oubliés et les sourires qui leurs était offert sont déjà attribués à d'autres clients. C'est une soirée éphémère à peine marquée par des rires. Simples souvenirs fugitifs, d'une futile soirée qui ne trouve d'égale que dans le bonheur présent qui s'est offert à cet instant. Le restaurant, simple endroit sans question. Interruption facile de la vie. Égoïste parfois, qu'importe. Lieu facilement réglé, où la vie coule sans difficultés. Quand je repense à l'aisance que ces gens ont de choisir leur repas, j'en jalouserais. Et plus encore j'envie l'indifférence des autres à leurs choix. Les gens semblent si incapable d'accepter des choix personnels, de se dépourvoir de tout jugement. Pourtant qu'ils soient enfermés dans les murs d'un restaurant, ou libre chez soi, ces choix personnels devraient n'être soumis qu'à notre jugement. J'aimerais tant avoir la même facilité de tout choisir, comme on choisit de préférer le chocolat ou la vanille.
texte modifié le 04:10:05

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